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Photo du rédacteurAlexis Perez

The Rise & Fall of Ziggy Stardust : cinquante ans d'existence, toujours vingt d'avance.

Dernière mise à jour : 28 nov. 2022

Cheveux rouges, costume rayé et bottes compensées, voici The Rise And Fall Of Ziggy Stardust And The Spiders From Mars de David Bowie. Un album culte, incontournable même, dont tout le monde a déjà entendu parler et qui s'affiche au palmarès de tous les classements depuis sa sortie. Symbole du glam et des années 70, il incarne à lui seul l'exubérance et l'extravagance de cette époque, marquée par la désillusion et la fin du rêve hippie. Vous l'aurez compris : on parle ici d'un classique absolu.


Pour commencer, cet album est un album concept d'un genre particulier. Loin de l'Opéra Rock à la manière du Tommy des Who sorti trois ans plus tôt. Ici, pas de récit linéaire, mais plutôt quelques morceaux qui décrivent le personnage et posent un décor. Des bribes de scènes de vie d'un groupe imaginaire, les Spiders from Mars, qui pourrait être le dernier groupe sur terre. D'ailleurs, tous les titres ne sont pas liés directement au personnage et à l'histoire de Ziggy.

A l'origine, l'album devait s'appeler Round And Round et être construit autour d'une reprise de la chanson de Chuck Berry Around and Around. La tracklist originale n'avait rien à voir. Starman n'existait pas et a finalement remplacé Round and Round quand la maison de disque avait réclamé un single percutant. Rock'n Roll Suicide non plus ne figurait pas sur la première mouture. Elle est venue remplacer le titre Holy Holy, déjà sorti en single en janvier 1971. Le classique rock Suffragette City a quant à lui pris la place de la perle Velvet Goldmine. Bon, heureusement pour nos oreilles, Velvet Goldmine a finalement été ajoutée en bonus track d'une réédition de l'album en 1990. Petite curiosité sur l'album : It Ain't Easy, reprise de Ron Davies, initialement enregistrée lors des sessions de Hunky Dory et qui a remplacé Amsterdam de Jacques Brel.


Voici donc à quoi ressemblait l'album que Bowie avait initialement envoyé à RCA, sa maison de disque, mi décembre 71. Au moment même de la sortie d'Hunky Dory dans les bacs. C'est que ça bossait dur à l'époque. Cet album, est un condensé de ce qui définissait Bowie en 72 et reprend en une dizaine de titres les styles qui avaient été explorés au cours des trois précédents albums : la folk du premier album, le hard rock de The Man Who Sold The World et la pop intimiste d'Hunky Dory.


Ziggy Stardust Alternate Tracklist sur Spotify, également disponible sur Deezer.


"To be played at maximum volume"


Parlons justement du son de cet album et de ce qui l'a amené là. Tout d'abord, il faut savoir que les sessions d'enregistrement ont duré 2 semaines étalées entre novembre 71 et février 72 aux studios Trident de Londres dans le quartier de Soho. Un partie de l'album avait même déjà été composée à l'été 71, juste après les séances d'enregistrement d'Hunky Dory. Pour Ziggy, un groupe à la formule simple : Mick Ronson à la guitare et au piano, Woody Woodmansey à la batterie et Trevor Bolder à la basse. Rick Wakeman, pianiste virtuose présent sur Hunky Dory, quitte Bowie pour rejoindre son nouveau groupe Yes en tournée. Bon OK... Excuses acceptées.


Élément déterminant sur le son de Ziggy Stardust : Mick Ronson. C'est le bras droit de Bowie à l'époque. Contrairement à ce dernier, il a une solide éducation musicale et c'est lui qui se charge des arrangements de cordes. Véritable cerveau musical, multi-instrumentiste, on lui doit la plupart des parties de piano. Steve Harley, du groupe The Cockney Rebels, disait d'ailleurs à son sujet que "c'était un des meilleurs musiciens rock de toute l'Histoire. Comme arrangeur, comme pianiste aussi [...] Ç'a dû être comme avoir Stravinsky dans ton groupe !"


Autre pivot de l'album : Ken Scott, co-producteur, qui avait commencé sa carrière quelques années plus tôt comme assistant son aux Studios d'EMI... avec les Beatles. Y'a pire comme baptême du feu. Ken Scott apporte à Ziggy un son d'une précision inégalée : il pouvait passer tout une journée rien qu'à le son de la batterie. Si on tend bien l'oreille, on peut aussi reconnaître le son du piano qui n'est autre que celui qui avait servi à l'enregistrement de Hey Jude des Beatles. Les 4 fantastiques étaient en effet venus aux Trident Studios en juillet 68 pour profiter du magnéto 8 pistes.

Le son de Ziggy Stardust, unique pour l'époque, a donc amplement contribué à faire de cet album un album culte. Un mélange des genres qu'on avait encore jamais entendu si ce n'est du côté de T-Rex qui venait tout juste de sortir Electric Warrior et qui n'est pas sans rappeler l'atmosphère de Ziggy Stardust.



Bowie devient Ziggy : la naissance d'un alter ego.


La dernière raison qui fait de cet album un moment particulier dans la carrière de Bowie, est la création de son premier avatar. Et justement, revenons sur T-Rex. Pour Bowie, l'album Electric Warrior a été une véritable révélation par le son et l'énergie qu'il dégageait. Mais le personnage de Marc Bolan, en particulier, a fasciné le jeune David dès les premières apparitions télé du groupe. Notamment à Top Of The Pops durant l'été 71. Il avait déjà un penchant pour l'androgynie depuis The Man Who Sold The World mais dès lors, son concept s'affine : on ajoute des paillettes, des boots et du make up, en veux-tu en voilà. Le Glam Rock sors les strass et les semelles compensées.

Pour peaufiner son personnage, Bowie s'inspire d'un chanteur de Rock'n Roll, Vince Taylor, connu pour son hit Brand New Cadillac (repris plus tard par les Clash). Bowie et lui partagent même quelques soirées ensembles à Londres en 66. Il lui doit son imagerie cuir/moustache, pardon, cuir mauvais garçon que l'on retrouve sur les photos intérieures de l'album.

Il lui emprunte aussi un retour au rock simple et efficace sur des titres comme Starman, Hang Onto Yourself et Suffragette City. D'après Bowie lui-même, Vince Taylor est l'une des clés dans la construction de Ziggy Stardust.

Parlons chiffons. Le 13 janvier 1972, Orange Mécanique sort en Angleterre et Bowie se rend avec Mick Ronson au cinéma entre ses séances de studio, peu après la sortie du film. Il s'inspirera des costumes des "Droogs" pour créer les combinaisons de ses Spiders From Mars. Mais ce ne sera pas la seule inspiration. Parmi ses références visuelles : Kansai Yamamoto, un créateur japonais, ou encore le théâtre japonais Kabuki, où les rôles féminins étaient joués par des hommes.


Un album - malheureusement - toujours en avance cinquante ans plus tard.


Pour finir sur le personnage, parlons du nom. L'origine du nom de Ziggy est assez floue. D'après Bowie lui-même, le nom viendrait d'une enseigne de tailleur londonien aperçue depuis un train. Plutôt amusant quand on sait la place qu'ont eu les fringues dans l'imagerie de l'artiste. Et il faut dire que le rapprochement avec le nom d'Iggy Pop n'est pas non plus étonnant vu la fascination qu'avait Bowie pour le leader des Stooges. Le nom "Stardust", lui, vient du Legendary Stardust Cowboy, un artiste marginal de psychobilly qui a avait commencé sa carrière dans les années 60. Disons que c'est la partie plus psyché et exotique du personnage.


Depuis la création de son personnage, Bowie avait prévu que son Ziggy aurait une fin. Ou que quelqu'un d'autre prendrait le relais et endosserait le costume. En 1973, le 3 juillet pour être précis, lassé de son personnage, il décide de le tuer symboliquement lors du final du concert au Hammersmith de Londres. Avant d'entamer Rock'n Roll Suicide, Ziggy déclare au public : "Non seulement ceci est le dernier concert de la tournée mais c'est le dernier concert que nous ferons jamais, merci !"


Ce qui a fait le succès de cet album, c'est le condensé d'influences dont il regorge. Du Velvet Underground à T-Rex en passant par Jacques Brel ou les Stooges, Ziggy Stardust traverse de nombreux styles et époques de la musique et en fait un album hors du temps. Véritable mise en abîme de son propre groupe façon Sgt. Peppers, Bowie permet à l'auditeur de s'identifier facilement au personnage de Ziggy en évitant de le décrire avec trop de précision. Chaque jeune anglais un peu "freak" comme on disait à l'époque (on parlerait aujourd'hui de "queer" ou de LGBTQ+), pouvait se reconnaître dans ce personnage haut en couleur qui prônait une liberté sexuelle rare dans l'Angleterre encore conservatrice du début des années 70. Sa déclaration le 22 janvier 72 au Melody Maker où il affirmait son homosexualité puis la diffusion de Starman à Top Of The Pops le 6 juillet 72 déclenchent une véritable Bowie Mania et achève le couronnement de la star...



Cette chronique avait initialement été réalisée en format vidéo sur ma chaîne YouTube perso. Vous pouvez la retrouver ci-dessous.


 

Retrouvez notre playlist Ziggy Stardust & friends sur Spotify :



Retrouvez notre playlist Ziggy Stardust & friends sur Deezer :





 


Si vous voulez en savoir plus, je vous recommande cet excellent documentaire de la BBC ainsi que ces deux bouquins : David Bowie, l'Avant-Garde Pop de Matthieu Thibault, paru chez Le Mot Et Le Reste, et David Bowie & Le Rock Dandy de Loïc Picaud, paru chez Hors Collection. Un grand merci aussi au site 5years.com, une vraie mine d'informations sur Ziggy Stardust.

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